COURANTS
1. Courants d'air ( 4)
Les six Eléments
ou organismes humani-Terre ( humanité – air) ( humanité-erre)
Chaque fois qu'on veut
l'allumer le feu
est pris de vitesse.
Il rechigne, il crache
Il se dérobe
à la flamme
à la hache
inspirée.
Quand il embrase mon âme
Il se décoche
tel une flèche
ravage les pins à croche
et déborde
les pompiers
pris de vitesse.
***
L'eau, elle, nous apaise
Elle éteint les braises
Encourage la vie
en nous. Elle est le fruit
juteux, la pluie
Qui soulage et règne
végétale
médicinale
sur la Terre qui saigne.
Lorsqu'elle s'affole
elle cogne
sur les terres inondées
sur les îles raz-de-marée
sur les gens désemparés
noyés.
***
Terre brûlée
Terre imbibée
Terre gelée
jette l'éponge
Personne ne fera naufrage
Terre d'asile
camp de réfugiés
fragile
retrouve le courage
d'absorber
les détritus
de faire respecter
ton âge
même aux plus obtus
de faire le ménage
jusque dans les airs
jusque dans l'atmosphère.
***
L'air méchant
l'air gentil
tu n'as pas l'air
d'être au courant
que l'air du temps
est aux échanges
avec les autres
avec les anges
Tant pis !
Ne prends pas ton air
abruti
je ne parle pas en l'air
ici
c'est irrespirable
je préfère
m'envoler
écouter
un petit air
de poésie.
***
Bois joli
combien toxique
bois exotique
au prix
exorbi-
tant pour les occi-
dentaux
que pour les forêts tropi-
cales, que pour les gens
à fond de cale.
Bois d'ébène
plus la peine
de mâcher du coca
contre la haine
il y a plus fûté que ça.
Dé-
cimer la forêt
amazonienne
sur un coup de dés
pour les lois du marché
tant pis pour la santé
de la Terre
et du vert.
Les nouveaux esclaves
se dissimulent dans les garages
cultivent les paysages
plus pour manger mais pour l'image
d'une technologie avancée.
Pourtant l'arbre
toujours ravagé
offre
tel un sage
ses fruits, ses années,
son message
sera-t-il écouté ?
***
Métal sonnant
et trébuchant
que ne ferait-on pour l'argent ?
Crimes, terreur,
viols, tortures,
même monsieur l'agent
commet des erreurs.
Le gouvernement
condamne ici les guerres
et finance là
les armes, épure
la planète, enferme
les contrevenants
oubliant
les grands malfaiteurs
les vrais dealers.
Pourtant
l'argent,
l'or, les oligo-
éléments,
les minéraux
pourraient être appréciés
pour le cadeau
de leur beauté
et le SEL
de la Terre
pourrait être échangé
pour élever
l'humanité
à son rang
de dignité,
enfin.
L'homme n'a-t-il pas du sang
divin ?
COURANTS
1. Courants d'air ( 3)
Autrefois – si un jour
je fus à la mode -
il suffisait de dire
qu'on était dans l'air
du temps,
c'est-à-dire
« in » ou « dans le vent ».
Aujourd'hui quand j'ose
dire « grave »
mon fils
me fusille
du regard.
Quelle chose
étrange
de vouloir
être « tendance »
à mon âge !
Ma place
c'est d'être quelque chose
comme « vieille France »...
Rien de bien grave...
***
Autrefois quand j'entendais
« quelque part »
la question que je posais
coulait
de source
claire
je demandais
« Où ? »
Aujourd'hui ma fille
me regarde
avec un sourire
de misère :
« C'est pas vrai !
Se garde-
t-elle de me dire,
elle pige pas une bille !
A se demander
quelque part
où elle est née ! »
???
COURANTS
Courants d'air ( 2)
Une flûte avait l'air
de ne pas s'en faire
pourtant l'on voyait
qu'un rien l'irritait.
Quand trois fois rien l'inspirait
un souffle la chatouillait
tout le long de son sifflet.
Alors elle secoua
le tambour endormi
et lui intima
l'ordre établi :
celui de tonner ma foi
ce jourd'hui
un bourdon au pas
de course, merci !
Enfin relayée
la flûte apprécie
de se taire un peu
pour mieux écouter
le sac étréci
du biniou peu
ou prou accordé.
Tant pis pour la note
mets ta redingote
ce soir la bombarde
à souhait nasillarde
hurlera si fort
que personne ne dort
jusqu'aux contreforts
de la Breizh braillarde.
Rires à Saint-Malo
danses sur les grèves
rouge aux joues chauffées
au cidre alcoolo
sur les routes qui mènent
les jeunes aux poteaux
mieux vaut s'entraîner
à jouer du pipo.
COURANTS
2. Courants marins
Immobiles les galets de couleurs
au fond du torrent.
Un seul bloc de pierres, soudé
au manteau de la Terre.
Lourdeur immémoriale.
Inutile de sortir
un joli caillou de l'eau.
Illusion de bouger.
Illusion de se détacher.
A quoi sert le ricochet ? Si ce n'est
à retourner d'où l'on vient.
Inlassablement.
Source aux chatoiements étincelants,
tu voyages au fil du temps.
Légère, chantante, fraîche aux chevilles
rouge-sang.
Source sans détour, tu files à toute
voile, à toute
joie, qui peut
interrompre ta course ?
La course
du courant est
source
de joie.
Éternellement.
L'instant d'une éclaboussure
n'est qu'un éclat
de jeu immédiat.
L'instant d'un sillage
n'est que prétexte
à refermer la plaie baie-ante.
L'instant d'une plage couverte
de gens n'enlève rien à l'éternité
du goémon
qui revient sagement
se ranger sur
le littoral inlas-sable.
Bouger est dans la nature des choses.
Courir est dans la nature de l'univers.
Même la masse d'une planète ne freine pas
sa course.
Chaque homme est une planète miniature.
Même moi.
COURANTS
COURANTS
Courants d'air
Libre de bouger, comme le vent spontané
dans la vigne vierge.
Comme ma soeur, attachée.
Attachée à d'autres frère et soeur, invisibles.
Pour chacun, s'éloigner de la même source. Ca
prendra le temps qu'il faudra, pour redevenir soi.
Libre de bouger, comme le vent qui joue
à faire peur.
Et bouger apporte la joie, une et indivisible.
Et bouger amène le dépassement de soi,
chaque ramification se fait sentir.
La neige cristallise l'arc-en-ciel au bord de
la piste.
Chaque végétal crisse sous ma glisse et me
cligne de l'oeil, rassurant.
« Regarde comme tu files », me confie-t-il
en secret.
« Je suis là pour durer, même si l'hiver,
j'ai l'air de ne plus exister.
Aie confiance en mes racines ». Rien
de plus têtu que la vie.
« Mais toi, tu peux jouer à bouger,
libre. »
Libre de bouger, comme le vent
qui s'étouffe.
Comme le vent qui brûle.
Comme le vent qui châtie.
Et le corps se soumet.
Et l'esprit se soumet.
Secrètement.
Sans même que je sois
au courant.